Le monument aux morts
square du 11 novembre 1918

Le monument aux morts" (©FC)

Un peu d’histoire

Après l’effroyable tragédie de la guerre de 1914-1918, Nîmes, comme toutes les communes de France (à de très rares exceptions), choisit un lieu de mémoire et du souvenir pour honorer les soldats morts pour la patrie. Le 12 octobre 1924 est inauguré, en présence du Président de la République gardois Gaston Doumergue, le monument aux morts du département du Gard, imposant édifice construit sur le côté ouest de l’Esplanade, face aux Arènes.

Le lieu

Chaque commune veut édifier un lieu du souvenir digne de la mémoire des soldats morts, placé le plus souvent au cœur des villages, sur la place, devant l’église ou devant la mairie et parfois dans le cimetière. A Nîmes, c’est le lieu de rassemblement traditionnel des Nîmois depuis des siècles, l’Esplanade, qui est choisi.

Buste de Soleillet (1888-1905)
Monument mutualiste (1917-1920)
Square Mourier (©collection cartes postales G. Taillefer)

Sur cet emplacement situé en face du couvent des religieuses St Maur (devenu aujourd’hui le lycée St Vincent de Paul), un petit square a accueilli dans un premier temps le buste de Paul Soleillet, grand explorateur nîmois, dont la statue en bronze fut déplacée en 1905 au jardin de la Fontaine puis fondue pendant la 2ème guerre mondiale. Le square prend alors le nom de Charles Mourier, conseiller général du Gard né à Vézenobres et ministre auprès de Georges Clémenceau pendant la guerre. De 1917 aux années 1920, on y érige un monument à la mémoire de Louis Marquis, fondateur de la Fédération mutualiste du Midi. Enfin, en 1924, on y construit le monument aux morts et le lieu prend en 1964 le nom de square du 11 novembre.

L’édifice

Ce monument aux morts de la guerre de 1914-1918 a été réalisé par l’architecte Henri Castan (1887-1954) originaire du Lot et le sculpteur marseillais Auguste Carli (1868-1930). C’est le plus grand du département et l’un des plus importants de France tant par sa taille que par ses éléments décoratifs : porte monumentale sculptée, ferronneries, salle circulaire souterraine décorée de mosaïques.

L’architecte Henri Castan a pris le parti d’une entrée monumentale, très large, encadrée de deux colonnes doriques et surmontée d’un fronton triangulaire sous lequel on peut lire l’inscription « Aux morts pour la patrie ». Dans ce fronton est sculptée une « pelta » ou bouclier des Amazones, entourée de feuilles de laurier et de chêne et sur laquelle sont rappelées les dates 1914-1918. Ce bouclier que l’on voit souvent dans les palais de justice est un symbole de protection du peuple.

Les sculptures

Les sculptures en haut relief qui encadrent la porte d’entrée ont été réalisées par Auguste Carli. Ce talentueux sculpteur a participé au renouveau de la sculpture ornementale de l’espace public dans sa ville de Marseille et est déjà connu dans le Gard pour la réalisation du monument aux morts de Saint-Jean-du-Gard, représentant une  » France triomphante  » .
Il présente à Nîmes deux compositions comprenant chacune quatre personnages. La scène de droite s’intitule La Ville de Nîmes transmettant l’appel de la patrie tandis qu’à gauche, La Patrie victorieuse rendant hommage aux morts, montre un soldat victorieux mais brisé par le souvenir de ses compagnons morts.

La Patrie victorieuse rendant hommage aux morts et La Ville de Nîmes transmettant l'appel de la patrie d’Auguste Carli (©FC)

A droite de la porte, le départ à la guerre est illustré par un homme faisant ses adieux à sa femme éplorée qui tient un enfant dans ses bras. Au-dessus de ce groupe s’élève une allégorie de Nîmes, grande femme drapée dans un voile avec la Maison Carrée sur la tête qui protège l’enfant de la main gauche tandis que, de la main droite, elle montre au père le chemin du combat et l’appel de la patrie.
A gauche de la porte est représenté le retour du soldat en 1918. Précédé d’une feuillette recueillie tenant un bouquet, le soldat porte une brassée de lauriers et il est suivi par un forgeron lui tendant une couronne. Une grande femme, aux mêmes traits que celle de droite mais sans l’attribut de la Maison Carrée, pose une main sur l’épaule du soldat et ouvre largement son manteau en tendant aussi une couronne tressée. Ces éléments symbolisent la victoire mais on lit sur les visages combien cette victoire est douloureuse.
La signature d’Auguste Carli et la date de 1924, toutes deux gravées, figurent sous les deux groupes de figures. Sous chaque ensemble sculpté, on peut lire également quelques vers de Victor Hugo : « Ceux qui pieusement sont morts pour la patrie ont droit qu’à leur cercueil la foule vienne et prie ». « Entre les plus beaux noms, leur nom est le plus beau, la voix d’un peuple entier les berce en leur tombeau ».

La salle souterraine

L’entrée du monument est fermée par une porte en fer forgé de très belle facture signée Tréchard et décorée en son centre d’une grande épée surmontée d’une couronne de lauriers, symbole de la victoire. La porte donne accès à une salle circulaire creusée dans le sol et décorée d’une mosaïque de tons pastels, signée par les frères Patrizio, artisans mosaïstes marseillais. Sur les murs sont gravés les noms des douze mille soldats morts du Gard auxquels sont venus s’ajouter les noms des soldats morts pendant la 2ème guerre mondiale. Contrairement à la majorité des monuments aux morts, celui-ci n’est pas dressé vers le ciel mais en partie enterré. Le grand nombre de noms à graver est à l’origine du choix de cette imposante salle circulaire.

La salle circulaire et les mosaïques des frères Patrizio (©FC)

Insolite et caché…

Le financement du projet a été très compliqué à mettre en place et a suscité beaucoup de controverses. La ville de Nîmes, en tant que Préfecture, revendiquait un monument grandiose qui rende hommage à tous les morts du département. Elle exigeait à ce titre la contribution financière de toutes les communes et habitants du Gard, ce qui déclencha de vives oppositions et des débats houleux, chaque commune ayant déjà à financer son propre monument.

Francine Cabane (septembre 2020)

Historique du square du 11 novembre à Nîmes Extrait de Nîmes au XXe Siècle – www.nemausensis.com

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