Le Monument aux morts de 1870
Place Duguesclin

Le monument des Combattants place d’Assas avant son transfert place Duguesclin (carte postale collection particulière © site nemausensis.com)

Un peu d’histoire

À quelques mètres à pied de la gare de Nîmes, au détour d’une rue, nous découvrons la charmante place Duguesclin, bordée de platanes avec en son centre, la statue qui répond à trois titres : Monument aux morts de 1870, Monument aux Enfants du Gard ou Monument des combattants.

Cette place a été créée dans la deuxième moitié du XIXe siècle quand a été loti le quartier de l’embarcadère.

Le projet de souscription publique lancé par le « Comité pour l’érection d’un monument à la mémoire des combattants de 1870-71 et des Enfants du Gard morts pour la Patrie » est adopté par le conseil municipal de Nîmes le 29 avril 1897. Dès le 13 avril, le conseil municipal accorde 15 000F pour financer le monument qui est inauguré le 9 mars 1902 sur la place d’Assas. Mais lors de la création du parking souterrain sur cette même place en 1986, il est transféré à son emplacement actuel place Duguesclin en 1991 (ce qui symboliquement fait sens : la loyauté dans la défense de la France).

Cette statue commémore la bataille de Bazeilles dans les Ardennes qui a eu lieu le 31 août et le 1er septembre 1870, dans laquelle 2500 soldats français sont morts après avoir résisté héroïquement à l’adversaire prussien. Elle glorifie également les combattants tombés pendant les guerres coloniales du XIXe siècle ainsi que des héros célèbres et hommes de guerre du Gard.

Alexandre Falguière – autoportrait (©musée des Beaux-Arts d’Angers) Portrait d’Alexandre Falguière  (©wikipedia.org consulté 29/9/2021)

Description

Sur le socle en pierre, des inscriptions sur les quatre faces :

  • face principale, en lettre de bronze : AUX / ENFANTS / DU / GARD / MORTS POUR LA PATRIE ; à même la pierre : AUX COMBATTANTS 1870-71
  • 
face arrière à même la pierre : MONUMENT ELEVE / PAR SOUSCRIPTION PUBLIQUE / INAUGURE LE 9 MARS 1902 / SOUS LA PRESIDENCE / DU GENERAL Cant LA 30ème DON / DELEGUE DU MINISTRE DE LA GUERRE / AUX MORTS / DES ARMEES DE TERRE ET DE MER / GARDE MOBILE / MOBILISTES. FRANCS TIREURS / 1870-1871
  • côté droit, sur le médaillon : LOUIS JOSEPH DE MONTCALM / NE / PRES NIMES / 1712-1758 – à même la pierre : DE ST VERAN DE MONTCALM / 1712-1759 / SERGENT PIERRE TRIAIRE / 1771-1799 / GENERAL BRUYERE 1772-1813
  • côté gauche, sur le médaillon : CH ER D’ASSAS/ LE / CURTIUS / FRANCAIS / TUE / AU COMBAT / DE / CLOSTERCAMP / 1760 ;
  • à même la pierre : CHEVALIER D’ASSAS 1713-1760 / MARECHAL DE THOIRAS / 1585-1636 / AMIRAL FRANCOIS PAUL BRUEYS / 1735-1798

Sur le socle de pierre se dresse la statue en bronze qui représente « la Patrie en deuil, debout, soutient un jeune guerrier expirant, tenant en main un tronçon de glaive ». Elle mesure 2,70 m de haut et est l’œuvre d’Antonin Mercié. Le bronze est réalisé par le fondeur parisien Gruet. Le piédestal est dû à Édouard Randon de Grolier, jeune architecte nîmois.
Après la première guerre mondiale, quatre canons pris aux armées allemandes sont disposés à chaque angle du monument avec des chaines. L’ensemble est conçu par Auguste Augière. Ils seront retirés ensuite.

La grande et belle jeune femme debout symbolise la Patrie. Elle marche. Un pied nu est posé sur le sol du champ de bataille. L’autre jette en arrière les plis amples de sa grande cape. Revêtue d’une robe longue dont nous voyons la partie inférieure gauche, elle est drapée dans cette cape dont les pans s’envolent suivant le mouvement de son corps. Son visage fier, aux traits classiques, est tourné vers l’ennemi, invisible. Son bras gauche au poing fermé déchire l’espace. À la diagonale de ce bras, répond la diagonale de son bras droit qui de sa main retient en un ultime effort le corps d’un jeune homme-soldat, nu aux yeux fermés qui glisse vers la mort. Il tient encore dans la main droite un morceau de glaive.
Lignes de force, nudité, beauté plastique des corps, gestes grandiloquents inscrivent cette œuvre dans le style académique. Cet exemple de la sculpture publique, qui a une fonction sociale et éducatrice, met en valeur la puissance nationale et l’héroïsme du soldat.

Le sculpteur, Antonin Mercié

Ramon Casas, Portrait d'Antonin Mercié (vers 1900), Barcelone, musée national d'art de Catalogne (©https://fr.wikipedia.org/wiki/Antonin-Mercié)

Sculpteur français né à Toulouse en 1845 et mort à Paris en 1916, il fut l’élève de François Jouffroy et d’Alexandre Falguière à l’École des beaux-arts de Paris. En 1868, à 23 ans, il obtient le premier prix de Rome et débute au Salon des Artistes français la même année. Ce sculpteur précoce est contemporain de Rodin, mais adopte une esthétique en référence à la Renaissance. Avec son groupe « Gloria Victis » (1874), il marque les esprits à 29 ans, par une statuaire engagée dans un sentiment de revanche après la défaite de 1870 face à la Prusse. Cette œuvre est très proche du Monument des Combattants de la place Duguesclin par son esthétique. Cet engagement patriote s’exprime surtout avec son « Quand Même ! » de 1886, érigé comme monument commémorant la défense de Belfort, à la mémoire de Thiers et de Denfert-Rochereau. L’artiste répondit à de nombreuses commandes publiques, à des réalisations de monuments funéraires, les cimetières devenant depuis le début du XIXe siècle de véritables musées (cimetière du Père Lachaise à Paris par exemple). À partir de 1880, il pratique la peinture. De son vivant, il eut de nombreuses récompenses : la médaille d’honneur à l’Exposition universelle de 1878, sa nomination comme membre de l’Institut en 1891 et un poste de professeur à l’École des beaux-arts de dessin et de sculpture en 1900. En 1913, il est nommé président de la Société des artistes français.

Hélène Deronne, Pascal Trarieux,
Octobre 2021.

Bibliographie

1994, Base Palissy, ministère de la Culture
2003, 14 février, communication écrite de M. Vazeilles, Nîmes, Archives municipales

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